Chaque jour, une épave : 31 mars 1903, La Geneviève, victime méconnue des Lavezzi

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Chaque jour, découvrez dans www.plongee-infos.com l’histoire d’une épave, coulée à la même date par le passé, quelque part près des côtes françaises ou ailleurs dans le monde, déjà explorée… ou pas ! Vous retrouverez ainsi quotidiennement un nouveau site, pour vous confectionner une collection passionnante pour vos futures plongées ou simplement pour explorer… l’Histoire!

« Sinistres Lavezzi où murmurent tant de naufragés, je n’irai point cueillir vos tamaris vieux-rose, ni vos jaunes cristes marines… »

Depuis le naufrage de la frégate Sémillante en 1855, les îles Lavezzi sont considérées comme l’une des passes les plus dangereuses en Méditerranée, entre la Corse et la Sardaigne. L’endroit est soumis à de fréquentes tempêtes et la zone est parsemée de rochers qui affleurent, rendant la navigation particulièrement délicate. A la suite de la catastrophe de la Sémillante qui a fait plus de 700 morts, un phare a été construit en 1874. Il n’a pas empêché un second naufrage qui se produisit le 21 janvier 1893, celui du paquebot L’Evénement qui ne fit fort heureusement aucune victime, puis un troisième avec le cargo Geneviève, le 31 mars 1903. Et plus récemment encore, en 1996, un céréalier panaméen, le Fenes est venu rejoindre ses prédécesseurs au pied des récifs de ce « paradis maudit ».

Mais revenons à Geneviève ; ce cargo à vapeur jaugeant 1000 tonnes, construit en 1873 par les chantiers Mounsey & Co de Sunderland en Grande Bretagne, pour la compagnie anglaise Walker de Middlesborougn, portait à son lancement le nom de Sea Gull. Long de 66 mètres sur 9 mètres de large, il était propulsé par une machine à vapeur de deux cylindres Compound et une hélice. Au bout d’un an, le cargo passa dans les mains de la compagnie Helmsing & Grimm de Riga en Lettonie et prit le nom de Betty. En 1883, il revint vers les rivages de son pays natal et entra dans la compagnie Pyman, Watson & Co de Cardiff, avant de repartir faire un séjour en Grèce chez Michalinos & Co au Pyrée de 1893 à 1899, sous le nom de Ariadne Michalinos. A partir de 1899, il changea encore une fois de nationalité pour devenir français et adopter le joli nom de Geneviève, œuvrant pour la compagnie Coste de Marseille sur les lignes de cabotage méditerranéennes au départ de la cité phocéenne, longeant l’Italie et traversant ensuite vers la côte tunisienne.

Le 31 mars 1903, la Geneviève, toujours pimpante, assurait sa liaison habituelle de Marseille vers la Tunisie. Après avoir longé la côte occidentale de la Corse, elle devait traverser le détroit de Bonifacio au niveau des îles Lavezzi, pour continuer sa route à l’abri de la côte orientale de la Sardaigne puis faire le saut de puce entre la pointe de la Sicile et la Tunisie, doublant l’île de Pantelleria pour terminer sa course à Sfax, dans le sud tunisien.

Le capitaine Gozzoli avait l’habitude d’emprunter cet itinéraire et il savait qu’il fallait rester prudent aux abords des Lavezzi, de sinistre réputation chez les navigateurs. Mais en cette fin de mars 1903, pas de tempête en vue, les conditions de navigation étaient encourageantes. Aussi, Gozzoli, au lieu de passer très au large, puis de remonter cap au nord-est comme font les navires pour prendre le couloir sûr entre les Lavezzi et la Sardaigne, décida de couper au plus près pour gagner du temps, puisque la météo le permettait. Mais c’était sans compter sur les caprices climatiques de cette zone qui n’en était pas à son premier mauvais coup… Alors que le cargo longeait les Lavezzi, une nappe de brume très dense monta brusquement et enveloppa la Geneviève, qui ne voyant plus la côte, perdit instantanément tous ses repères. Déporté par les courants particulièrement forts dans le détroit, le cargo se rapprocha dangereusement des îlots rocheux et finit par heurter violemment un récif sur la côte de l’île Lavezzi.

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Ironie du sort, le cargo s’échoua à peine à 300 mètres au nord de l’endroit où eut lieu le dramatique naufrage de la Sémillante, un demi-siècle plus tôt. Heureusement cette fois-ci, le temps était plus clément et les 21 marins de l’équipage ont eu tout le temps d’évacuer le bateau et de gagner le rivage avant que la Geneviève ne sombre sans faire de victime.

Les mésaventures de l’équipage n’étaient pas finies, car au début du XXe siècle, les îles Lavezzi n’étaient pas habitées. En attendant les secours, les marins furent obligés de s’abriter dans le cimetière où reposent les victimes du naufrage de la Sémillante, seule construction de l’île avec la pyramide marquant l’endroit du drame. Ils passèrent ainsi la nuit sur les tombes de leurs aînés, avant d’être recueillis au petit patin par un pêcheur qui venait relever ses filets. Celui-ci les ramena à Bonifacio et après quelques soins et une copieuse restauration, ils furent transférés vers Bastia par le contre-torpilleur Cyclone. De là, ils purent être ramenés à Marseille par un bateau de ligne. Et, suprême ironie, les naufragés de la Geneviève reprirent la route de Marseille sur le paquebot Liban, le même qui, à peine 2 mois plus tard, allait faire naufrage devant Marseille dans une collision avec le bateau l’Insulaire. Mais cela est une autre histoire…

Les restes de la Geneviève sont éparpillés dans quelques mètres d’eau entre les rochers à 300 mètres au nord de la pyramide de la Sémillante, aux coordonnées : latitude 41° 20’ 400 N et longitude 9° 14’ 883 E.

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