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Par Phil Simha / Sunfish Productions

Pour les plongeurs, apprendre l’orientation sous-marine est une science aux multiples mérites. De tous temps, les explorateurs ont eu la vie sauve grâce à leur technique de navigation. Si c’est purement à la chance que Christophe Colomb doit d’avoir découvert l’Amérique, c’est à l’art de la navigation que Vasco de Gama doit, lui, d’avoir atteint les Indes comme il l’avait prévu. A fortiori pour les plongeurs, dont le retour en sécurité au bateau dépend fortement de leur sens de l’orientation…

En plongée, il est important de toujours observer la configuration des fonds afin de déterminer des points de repère

Autant certaines plongées se limitent à descendre le long d’un tombant avant de le remonter vers la surface, autant les plongées dotées de chemins de traverses sont nombreuses et font appel à des techniques de navigation fiable. On ne rappellera jamais assez que la plongée sous-marine se déroule dans un environnement qui ne nous est à priori pas naturel et dans lequel on peut facilement passer du sentiment de béatitude totale à celui d’angoisse sourde. Se sentir perdu sous l’eau est une de ces sensations désagréables dont on préfère autant que possible se passer en plongée, à plus forte raison lorsque l’on sait à quel point le temps dont nous disposons et  la réserve d’air embarquée sont limités. Savoir s’orienter en plongée, c’est la clé d’un confort additionnel, le meilleur moyen d’éviter des longues nages en surface, la certitude de trouver le site recherché en ayant tout l’air nécessaire pour l’explorer et, enfin, la tranquillité d’esprit qui nous accompagne lorsque l’on sait pouvoir retrouver le point de sortie sans devoir remonter régulièrement en surface. Que ce soit dans des environnements de visibilité limitée, comme les lacs, les carrières ou les côtes Atlantiques que fréquentent souvent les plongeurs, ou même dans les conditions bien plus favorables de la Méditerranée, la capacité de s’orienter sous l’eau signifie donc un gain de sérénité, une économie de temps et d’énergie précieuse, mais aussi une sécurité accrue ; en somme, tout simplement, une bien meilleure qualité de plongée. En fin de compte, pouvoir naviguer sous l’eau présente une multitude d’avantages qui contribuent grandement au bien-être de tous les plongeurs. L’orientation sous-marine fait sans aucun doute partie des programmes qu’un plongeur devrait rapidement envisager.

L’important en plongée est d’être capable de revenir au bateau…

Planifier les plongées d’orientation

Bien que nettement moins complexe que la randonnée en montagne de par les distances plus raisonnables qui sont parcourues, une balade sous-marine demande tout de même un peu de planification et d’organisation. Les premières questions que nous devons nous poser sont de savoir si la plongée a pour objectif de rejoindre un point précis – un récif particulier, une épave située sur un fond sableux – ou s’il s’agit simplement de réaliser une promenade d’exploration avec l’objectif de revenir à son point de départ, au mouillage du bateau. Dans le premier cas, disposer d’une carte et de références précises – des amers en surface et des caps sous l’eau – sera un atout indispensable à la planification de la plongée. Lors d’une exploration en revanche, comme son nom l’indique, il n’y pas nécessairement d’autre objectif que de découvrir une certaine zone sous-marine et pour cela seules quelques notions importantes comme la profondeur du site ou la topographie sont alors importantes, le reste étant, justement, affaire de navigation sous l’eau. Dans les deux cas cependant, certaines décisions doivent être prises à l’avance, à commencer par savoir quelles techniques d’orientation nous sont nécessaires pour la plongée et déterminer quel membre de la palanquée jouera quel rôle pendant les phases de navigation. Un excellent moyen de répartir les tâches étant par exemple qu’un plongeur se charge de la manipulation du compas, pendant que son binôme s’assure du maintien de la profondeur prévue tout en prenant note de références naturelles au fur et à mesure du parcours ; le même binôme pourra aussi se charger de maintenir un tempo raisonnable, le navigateur ayant souvent tendance à palmer bien plus vite qu’à l’accoutumée, comme s’il cherchait à s’assurer que son cap ne puisse pas lui échapper !

Pour être sur de reconnaitre les repères au retour, il faut les observer dans le sens du retour

Estimer les distances

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Là aussi, comme pour tout voyage,  il nous faut avoir une idée des distances que nous allons parcourir sous l’eau afin que notre navigation puisse se révéler efficace. Dans la formation d’orientation sous-marine, plusieurs méthodes d’évaluation des distances parcourues sont enseignées, certaines offrant nettement plus de précision que d’autres, mais toutes étant nécessaires à la constitution d’une palette à appliquer en fonction du type de site sur lequel nous plongeons. Pour établir et comparer les différentes méthodes, la première étape est de mesurer et marquer une distance de 50 mètres au moyen d’un dévidoir ou à l’aide de références visuelles. Chaque plongeur va ensuite commencer par déterminer le nombre de cycles de palmage qui lui sont nécessaires pour couvrir la dite distance ; pour ce faire, on démarre par exemple palme droite en bas et on compte un cycle chaque fois que la palme droite revient à son point de départ, tout en parcourant la distance prescrite. En suivant la même référence, le chemin du retour va ensuite permettre de mesurer le temps écoulé pour couvrir cette distance, nous amenant ainsi une deuxième référence relativement fiable. Même si ces deux méthodes ont fait leur preuve, la seule méthode réellement sûre revient à mesurer la distance en utilisant l’écartement des bras sur le fond : en effet, alors qu’avec les deux systèmes précédents, la précision est tributaire de la régularité de notre tempo, dans le dernier cas au moins, nous sommes à peu près sûrs que la longueur de nos bras ne va pas changer en cours de plongée ! Pour des raisons pratiques, cependant, l’écartement des bras reste une méthode rarement employable, à moins de se limiter effectivement à des plongées qui se dérouleraient toujours sur le fond…

L’utilisation d’un compas est une sécurité supplémentaire, à condition de savoir l’utiliser

Naviguer sous l’eau

Une fois la notion de distance parcourue acquise, l’étape suivante est de commencer la mise en pratique des techniques, clarifiées si nécessaire par les discussions avec l’instructeur. Autant le cours vise à développer les compétences techniques elles-mêmes, autant il se base sur une application pratique et sensée, telle que la capacité de retrouver des sites de plongées dont les coordonnées auraient été disponibles avant le début de la plongée. Pour naviguer avec précision en plongée, l’un des moyens les plus simples et pratiques de se repérer est de commencer par l’emploi de références naturelles ;  outre sa fiabilité (pour autant qu’on ne choisisse pas des poissons comme références…), la navigation naturelle a l’énorme avantage de contribuer à développer les capacités d’observation de l’environnement de manière radicale. Parmi les éléments fondamentaux de la navigation naturelle, certains éléments comme l’angle du soleil, les ondulations d’un fond sableux, les différences de reliefs, ou encore bien sûr les rochers ou les blocs de coraux rencontrés, vont tous pouvoir être utilisés de manière efficace. Dans la formation d’orientation sous-marine, l’exercice de navigation naturelle se traduit par un aller-retour sur une distance de 50 mètres, estimée selon l’une des méthodes préalablement pratiquées. Le travail se fait toujours en binôme et dans cette partie de la plongée, les deux compagnons vont pouvoir mettre à profit leurs capacités d’observation en se signalant mutuellement les points de repères qu’ils jugent utiles et en reportant ceux-ci sur une ardoise, de manière à faciliter le trajet retour. Pour s’assurer de la qualité des informations notées, il est important que les élèves s’attardent un instant sur chaque référence naturelle en prenant le temps de la considérer sous l’angle qu’elle aura dans le sens contraire, afin d’avoir déjà une idée visuelle de ce à quoi le chemin de retour ressemblera. C’est le principe du Petit Poucet : si de bonnes références ont été relevées durant toute la balade, non seulement le parcours qui nous ramène au point de départ est réellement clair, mais en plus cet entraînement aboutit facilement ensuite à la réalisation d’une carte sous-marine simple et fiable, qui devrait ensuite permettre à d’autres plongeurs de naviguer le même parcours. Bien que cette dernière option ne soit pas l’une des performances requises de la formation, elle constitue un excellent moyen – pour les élèves comme pour les instructeurs – d’évaluer l’acuité du travail effectué et de sentir que le sujet est bien maîtrisé.

En plongée de nuit, l’orientation revêt une importance particulière

L’étape suivante est d’effectuer à nouveau un aller-retour sur une distance de 50 mètres, mais cette fois à l’aide du compas. Si les élèves sont bien à l’aise avec les différentes formes de lecture d’une boussole, le cap peut être prédéterminé ; sinon, il vaut mieux qu’il soit décidé sur le moment, l’instructeur pointant simplement la direction dans laquelle l’élève navigateur va devoir nager. Si le cap a été fixé au préalable, alors les élèves auront déjà aussi prévu le cap retour, situé logiquement à 180° du cap aller ; dans le cas contraire, une technique simple pour se remémorer avec l’utilisation du compas est de choisir un point cardinal comme direction initiale, puis de revenir dans la direction opposée. Une fois cette base de l’orientation au compas revue, plusieurs exercices vont nous faire répéter divers schémas d’orientation basés sur des virages à 90°, toujours en commençant tranquillement par l’utilisation des points cardinaux, puis en se fixant des caps sous forme de degrés. En se basant sur des côtés de 50 mètres de long, les élèves parcourent ainsi des carrés, des rectangles, et peuvent ensuite évoluer vers des triangles (virages de 120°), avec l’objectif fixé d’aboutir à un maximum de 8 mètres du point de départ, ce qui représente une performance parfaitement acceptable sur la distance cumulée. Toujours à l’aide de la boussole, les schémas réalisés vont ensuite s’affiner et se développer vers des carrés excentriques et des schémas en “U”, cette fois-ci basés non plus sur la distance parcourue, mais sur le nombre de cycle de palmage, afin d’aboutir à une maîtrise satisfaisante des toutes les méthodes proposées. Non seulement l’ensemble de ces exercices assure une bonne compréhension et garantit de bonnes capacités de navigation sous-marine en général, mais ils servent aussi bien entendu à préparer les participants à d’autres formations continues, comme le cours de recherche et récupération d’objets ou les épreuves de recherche d’un plongeur disparu du cours de Rescue Diver de PADI. Notons enfin que pour les élèves qui disposent déjà d’une expérience en plongée de nuit, il est également possible de réaliser des plongées du cours dans cette ambiance particulière, avec l’atout majeur de renforcer encore les compétences et la confiance des participants.

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