Chaque jour, une épave : 28 décembre 1919, l’Asie, histoire de malchance

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Chaque jour, découvrez dans www.plongee-infos.com l’histoire d’une épave, coulée à la même date par le passé, quelque part près des côtes françaises ou ailleurs dans le monde, déjà explorée… ou pas ! Vous retrouverez ainsi quotidiennement un nouveau site, pour vous confectionner une collection passionnante pour vos futures plongées ou simplement pour explorer… l’Histoire!

Le 28 décembre 1919, le 4 mâts Asie, appartenant lors de sa perte à l’armateur Bordes, Antoine, Dominique et Fils, de Paris, connut une fin qu’il avait déjà frôlée plusieurs fois dans sa carrière très mouvementée…

L’Asie, grand transporteur à voiles de 4 mâts barque ( 3 mâts gréés en voiles carrées et le 4e en voile aurique), en acier riveté, jaugeant 3 500 tonnes, 4 500 m2 de voilure, 92,5 mètres de long, 12,7 mètres de large pour 8,3 mètres de tirant d’eau, était le deuxième bateau de cette série, construit en 1897 par les Chantiers de Normandie à Rouen, à l’origine pour le compte de la Compagnie de Navigation d’Orbigny de La rochelle pour qui il navigua jusqu’en 1908, avant de passer dans les mains de la compagnie Bordes, qui exploitait pas moins de 127 voiliers.

Il faut d’abord préciser pour les non-connaisseurs que ces très grands voiliers qui, en ce début de l’ère de la marine motorisée, n’utilisaient encore que le vent comme moyen de propulsion, possédaient des surfaces de voilure impressionnantes, avaient une particularité dont il fallait tenir compte impérativement : même avec leur tirant d’eau important, l’immense voilure et la hauteur des mâts les rendaient très instables à vide. La cargaison faisait office de lest et les stabilisait, évitant ainsi d’avoir une quille trop longue. A vide par contre, le centre de gravité très élevé à cause de la hauteur des mâts risquait de les faire chavirer. On les chargeait donc d’un lest en attendant leur prochaine cargaison…

Dès sa naissance, ce grand voilier à la stature majestueuse, connut des difficultés. Le lancement de l´ASIE ne se fit pas dans l´euphorie habituelle, le 11 septembre 1897 pour l’armateur d´Orbigny et Faustin. Son sister-ship, l’Europe, gît déjà couché sur le côté, le long de l´appontement (ce premier voilier frère de l’Asie, a été construit quelques mois plus tôt. Quelques minutes après son lancement le 17 mai 1897, suite à une série de fausses manœuvres d’un bateau-omnibus, manqua d’aborder le steamer. Alors qu’on terminait son armement, l’Europe, pas encore lesté, fut pris par un très fort coup de vent dans la nuit du 14 au 15 août, et sa borne d’amarrage fut arrachée. Le navire s’écarta du quai, évita de peu un autre bateau et se coucha avec une extrême violence sur le wharf des Chantiers de Normandie. Les vergues s’enfoncèrent de plus de trois mètres dans le sol. Les opérations pour le remettre à flot furent particulièrement longues et complexes. Il fallut ensuite refaire toute la mâture et le gréement de ce superbe bateau…).

Après que le curé de Grand-Quevilly, l´abbé Chevalier, parrain de l’Asie pour l´occasion, eut coupé la corde, le voilier alla directement emboutir un ponton de la rive droite de la Seine, mais on évita le pire et l’accrochage fut sans gravité.

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Cet incident lors de son lancement est cependant un mauvais présage, puisqu´il arriva à l’Asie la même mésaventure qu´à son sister-ship, Europe, quelque temps plus tard.

Lors de son troisième voyage, en faisant le tour du monde d’est en ouest, après une escale à l’aller à Hobarth (Australie), du 5 au 9 octobre 1901, l’Asie se rendit aux Etats Unis, sur la côte Pacifique. Mal lesté, le navire chavira sur les quais de Portland (Oregon) le 31 décembre 1901. Un grand voilier de charge est conçu pour être stable avec sa cargaison complète. Vide, sa stabilité est très faible et il a besoin d’être lesté, d’autant plus que les conditions de navigation sont dures. Dans certains ports nord-américains, l’habitude était prise de vider complétement les voiliers avant de les charger et de remédier à leur manque de stabilité, en maintenant de lourdes pièces de bois de chaque bord, à l’extérieur de la coque. Mais cela n’a pas été suffisant et l’Asie a chaviré sur le quai et les hangars, heureusement sans faire de blessés. On parvint tout de même à le redresser pour le remettre en état. Il n’est reparti que le 28 juillet 1902, près de sept mois plus tard. Le retour se fit sans encombre par le Cap Horn, vent arrière, comme lors des retours de Nouvelle-Calédonie.

Le sixième voyage de l’Asie, commandé par le capitaine Ollivaud, sur ballast (lest qui remplace la cargaison – voir plus haut), fut encore pour Portland, avec escale à Hobart en septembre 1905. Drossé par la houle contre des falaises de Tasmanie, son mât de beaupré rentra dans une crevasse, ce qui eut pour effet de stabiliser le voilier. Coincé dans cette situation délicate, le navire risquait à tout instant de se briser. Puis le beaupré finit par casser, restant accroché au navire par le gréement. Une risée venant de terre arriva juste au bon moment et écarta le navire qui put ainsi se sortir de ce mauvais pas et alla mouiller ses ancres dans la baie. Deux jours plus tard, il accostera à Hobart pour réparer les dégâts.

L´ASIE fut acquis par l´armement Bordes en 1908. Il connut ensuite une période faste jusqu’au 28 décembre 1919, transportant principalement des cargaisons de nitrate de soude, spécialité de l’armateur. Arrivant à Nantes par un sale temps pluvieux et un vent de sud-ouest, tracté par le remorqueur Commerce, dans l´estuaire de la Loire (passes de Saint-Nazaire), il talonna les brisants des Jardinets dans le chenal, par une latitude de 47° 12’ 057 N et une longitude de 02° 15’ 580 W. Le quatre-mâts se coucha sur bâbord et le commandant Ollivier et son équipage durent l´évacuer. Il n’y eut aucune victime, mais on ne put jamais redresser le grand voilier pour le remettre à flot. Il resta définitivement sur le site sous quelques mètres d’eau, ses mâts dépassant de la surface servirent aux signaux du port de Saint Nazaire ; la figure de proue fut retrouvée sur la plage de Tharon et déposée au Musée des salorges de Nantes.

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