Publicité

Le dire c’est bien, le “Fer” s’est mieux !

Voici ce qui pourrait être mon dicton ou la définition d’un tempérament qui m’a amené à me construire par “les gestes”, à découvrir et comprendre le monde par le travail manuel, par l’expérience du contact aux choses et aux matières. Quoi de plus vrai que le travail manuel, pas de place pour la triche ou le mensonge, un geste imparfait et le bois fend ou le métal se plie, il faut être totalement présent et centré sur ce que l’on réalise, communier avec la matière au travers des gestes précis qui s’affineront de jour en jour grâce aux multiples expériences et défis relevés.

Les défis auront d’ailleurs été multiples dans ma vie et celui des épaves marque un tournant dans mon travail de l’acier, mais d’abord un peu d’histoire et description de mon travail artistique en général :

pas vraiment fait pour le moule un peu trop étriqué du système scolaire, j’y ai assez vite perdu pied et ma bouée de sauvetage a été le “manuel” au travers la technologie et les arts plastiques, ouf une bouffée d’oxygène !

A la suite d’une formation en communication visuelle à l’Académie Charpentier à Paris, j’entre dans la grand bain des agences de pub en tant que graphiste, mais y découvre assez vite un travail de manipulation de masse qui très vite ne me convient plus, heureusement en parallèle et en autodidacte, j’amorce mes premiers pas dans la ferronnerie / métallerie, et me crée mon jardin secret.

Proche de l’art “brut”, ce travail artistique s’impose comme un besoin de m’entourer, de me créer mon propre univers : personnages ou objets familiers… C’est un jeu d’improvisation, de rencontre et de récupération.

En effet, mes petits moyens de l’époque et une envie précoce de recyclage me guident vers la recherche et la récupération de pièces et d’objets métalliques, premier stade de mon travail.

Publicité

Ensuite, je me nourris du monde qui m’entoure et des stéréotypes qu’il peut nous offrir. Transcrire, représenter et tourner en dérision notre quotidien, notre société, des souvenirs, des proches et mettre en avant le contraste entre les vieilles pièces rouillées et la vie qui s’en dégage une fois assemblées dans une oeuvre.

Installé depuis 2002 en tant qu’artiste indépendant, je modèle la matière au gré de nombreux thèmes et univers différents. Utilitaires ou purement esthétiques, mes réalisations nous emmènent dans des voyages poétiques

Mon langage est plutôt contemporain, souvent figuratif, ludique voir humoristique

J’ai même le sentiment que le jeu fait partie de mon processus créatif, il subsiste forcément une part d’enfant en chacun d’entre nous et elle resurgi tôt ou tard.

Mon médium «l’acier» est très souvent traité sous l’angle du temps qui s’impose à la matière au travers la rouille et l’oxydation. Dans un monde qui va toujours plus vite, qui rêve d’immédiateté autant que d’immortalité, J’aime ces questionnements sur le temps, sur les cycles de la vie et de la matière. Même l’acier qui semble si robuste quand il sort encore tout chaud des grands fourneaux ou laminoirs, finit lui aussi par plier sous les règles du temps.

On ne triche ni avec la matière, ni avec le temps, on les apprivoise momentanément

Revenons à nos bateaux, comment sont-ils nés ? A nouveau une rencontre, un jeu et un défi… C’est en fait un ami qui, passionné de la mer et des aquariums, et se plaignant de la médiocrité des décors en plastique, m’encouragea à créer des décors authentiques pour y voir s’y installer la vie comme dans les vrais fonds marins. De là, naît l’idée de reconstituer des miniatures d’épaves sous marine.

N’étant ni issu du monde de la plongée, ni issu du monde de la navigation, je me suis d’une part documenté sur les bateaux et les épaves et d’autre part mis en quête de matière première, car je savais que je ne pouvais pas truquer le vieillissement de la tôle, il me fallait donc trouver des tôles avec un vrai délabrement et un vécu réel. Puis dans ces tôles souvent glanées en campagne dans les fermes, je découpe et façonne ces répliques d’épaves. Sans faire des reproductions historiques, les photos me servent de guide pour respecter les proportions des bateaux et l’état de décomposition, c’est là que le travail devient plutôt artistique, choisir une partie du bateau à mettre en valeur, trouver une pose et un bel équilibre, réaliser certains détails mais pas trop…

Et chercher à donner l’illusion d’une vraie épave qui aurait rétréci comme par magie

Finalement le projet de plonger dans des aquariums est, pour l’instant, restée en suspend car mes épaves diffusent énormément de rouille dés qu’elles sont dans l’eau, mais on en profite tout autant posée sur un meuble et bien éclairée.

Je suis récemment tombé sur ce texte d’Alain Rémond qui illustre le monde des épaves et qui traduit à merveille ce que provoque aussi la rencontre avec mes bateaux, merci à lui : “Un bateau, c’est un voyage, c’est mille voyages. Il ramène avec lui des histoires de voyages, des récits d’aventures, des légendes fabuleuses. Chaque bateau est un trésor, et son trésor, c’est ce qu’il raconte. De toutes les choses qui vieillissent et se rouillent, les bateaux sont les plus riches en rêves, en histoires. Ils racontent les départs au petit matin, les retours dans la nuit, les longues journées sous le soleil, dans le vent, dans le fracas des vagues et les avalanches d’écume.

La coque des bateaux est irradiée par la mer, par tout ce que cache et recèle la mer, elle porte inscrite en elle l’effroi du fond des océans et la splendeur des trésors engloutis. La mer est le royaume de légendes, là où s’écrivent les plus beaux exploits comme les plus grandes tragédies. Le marin n’est pas d’ici, il appartient à l’espace infini, à cette immensité dont nul jamais n’aura la clé.

Voilà ce que disent les coques échouées au fond d’une anse oubliée, les épaves corrodées, pleines de sel, de rouille, de peinture, d’eau et de sable. Les épaves sont comme des tableaux peints par le vent, par le temps.

Elles fabriquent silencieusement quelque chose comme de l’éternité. Au cimetière, elles se transmutent. Voyageuses immobiles, elles creusent le lent sillage du temps.”

Mes sources d’inspiration sont principalement des cargos marchands de la période mi-voile, mi-vapeur (l’Absirtea, l’Artiglio…) et jusqu’à fin des années 2000. J’utilise à la fois de modèles immergés que de photos de surface de cimetière maritime (Porthsmouth, Nouadhibon en Mauritanie…).

Sébastien Guandalini – Création Métal

www. sebastouille.com

 

LEAVE A REPLY

Entrez votre commentaire s'il vous plaît !
Veuillez entrer votre nom ici


Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.