Chaque jour, une épave : 13 mars 1971, le France à Annecy

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Chaque jour, découvrez dans www.plongee-infos.com l’histoire d’une épave, coulée à la même date par le passé, quelque part près des côtes françaises ou ailleurs dans le monde, déjà explorée… ou pas ! Vous retrouverez ainsi quotidiennement un nouveau site, pour vous confectionner une collection passionnante pour vos futures plongées ou simplement pour explorer… l’Histoire!

Le France, dont il est question ici, n’est pas le grand paquebot prestigieux qui fit la fierté nationale dans les années 60/70, mais ce que l’on appelait à l’époque un « bateau-salon » dédié au transport touristique sur le lac d’Annecy. C’était un bateau à vapeur à roues à aubes de 47 mètres de long sur 12 mètres de large, de 40 tonnes capable de transporter 700 passagers sur deux ponts. Sa machine à vapeur de 350 cv activait ses deux roues à aubes latérales et le propulsait à une vitesse de 27 km/h (nous sommes ici chez les «marins d’eau douce», la vitesse en eaux intérieures se mesure toujours en km/h et non pas en nœuds comme chez les coureurs d’océans).

Le navire lacustre tout aussi prestigieux (localement) que son futur homonyme fleuron de la flotte de la Compagnie Générale Transatlantique, a été construit en deux étapes : les différentes pièces détachées ayant été fabriquées par les chantiers Escher Wyss de Zürich, ont été transportées à Annecy pour y être assemblées aux chantiers de La Puya en 1908, dans un hangar où il était tellement à l’étroit qu’il a fallu le sortir de là pour poser la timonerie et la cheminée, la hauteur sous plafond n’étant pas suffisante. Il faut dire qu’à l’époque, les constructeurs de bateaux fluviaux ou lacustres n’étaient pas habitués à construire des unités de cette taille. Le France fut d’ailleurs le dernier bateau à vapeur et à roues à aubes à être construit dans le pays. Il fut l’un des plus prestigieux bateaux à aubes du lac ; cependant, les connaisseurs s’aperçurent vite qu’il avait un petit air penché dû à une erreur de fabrication… L’erreur fut corrigée, mais il garda toujours par la suite ce petit trait de caractère.

Le France commença sa carrière sur le lac d’Annecy le 13 mai 1909. Son équipage était composé d’un capitaine, d’un mécanicien, de deux chauffeurs et d’un graisseur. Il était équipé d’un restaurant (avec une cuisine réalisée à bord) et d’un salon fumoir qui lui offraient une prestance propre à séduire les passagers d’une certaine classe, en dehors des deux ponts touristiques. S’arrêtant à chaque port, il accomplissait le tour du lac en 2h15 pour revenir à son point de départ, le débarcadère du Quai de la Tournette à Annecy.

Pour chaque voyage autour du lac, la machine à vapeur consommait une tonne de charbon. Quand on parle de prestige, notons qu’en 1910, le Président de la République Armand Fallières, venu assister aux fêtes du cinquantenaire du rattachement de la Savoie à la France, effectua en compagnie d’invités de marque une croisière sur le lac à bord du France.

Le France a ainsi assuré son service régulier à travers le lac pendant de nombreuses années, sans problème. Ne dit-on pas que la vie de province est un long (fleuve) lac tranquille ?… Pendant la Seconde Guerre mondiale, cette vie tranquille va pourtant être bouleversée. Le temps n’était plus à la fête et l’activité fut sérieusement ralentie. En mars 1944, le France, à quai depuis quelque temps, fut utilisé comme bateau-prison par les miliciens à la suite de l’arrestation d’une centaine de résistants suite à une rafle dans la ville d’Annecy.

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Mais les périodes sombres ont toujours une fin et l’après-guerre sonna le redémarrage des activités touristiques sur le lac. Le France, qui accusait déjà une bonne quarantaine d’années, suivit une cure de rajeunissement qui lui permit d’entamer une seconde carrière qui dura jusqu’en 1962, année où il a été retiré du service et vendu à un particulier. Il perdit donc son certificat de navigation en tant que bateau transporteur de public à partir de 1963, pour devenir le luxueux jouet d’une personnalité qui l’utilisa encore pendant deux ans pour ses promenades dans le cadre magnifique de ce lac niché dans son écrin de montagnes.

En 1965, le France fit son dernier tour d’honneur avant de quitter la scène. A partir de là, il resta au mouillage face à l’Impérial Palace d’Annecy-le-Vieux, dans la baie d’Albigny, se dégradant au fil du temps par manque d’entretien.

Le matin du 13 mars 1971, le France, qui avait trop souffert de son inactivité et du manque de soins, tira sa révérence. La coque déjà mal en point, n’a pas supporté le froid de l’hiver et le gel qui a fait éclater quelques jointures de coque, créant des voies d’eau qui ont eu raison du vieux navire. Il sombra doucement, comme un vieil acteur sortirait de scène sur la pointe des pieds… Les conditions exactes du naufrage n’ont jamais été fixées clairement, mais il est très probable qu’il est dû simplement au manque d’entretien.

Aujourd’hui, le France a trouvé une nouvelle vie, puisqu’il est devenu l’un des sites de plongée les plus fréquentés de la région. Des centaines de plongeurs vont régulièrement le saluer, dans son dernier refuge par 42 mètres de fond (le haut de l’épave est sur 34 m), malgré le manque de visibilité de l’eau très sombre et la température qui au fond, atteint péniblement les 6 à 7 degrés. Les coordonnées sont : latitude 45° 53’ 850 N et longitude 6° 08’ 970 E. Les clubs de plongée locaux proposent régulièrement cette plongée mythique à leurs clients qui en reviennent toujours frigorifiés, mais enchantés !

Lien vers vidéo Youtube de Robin Baertschi :

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