Chaque jour, une épave : 11 janvier 1920, le paquebot Afrique

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Chaque jour, découvrez dans www.plongee-infos.com l’histoire d’une épave, coulée à la même date par le passé, quelque part près des côtes françaises ou ailleurs dans le monde, déjà explorée… ou pas ! Vous retrouverez ainsi quotidiennement un nouveau site, pour vous confectionner une collection passionnante pour vos futures plongées ou simplement pour explorer… l’Histoire!

L’Afrique était un paquebot mixte (passagers / fret)construit en 1907 par les chantiers anglais Swan, Hunter & Wigham Richardson, de Wallsend, appartenant à la ligne maritime des Chargeurs réunis. Long de 119 mètres pour 14 mètres de largeur et 6,5 mètres de tirant d’eau, il était motorisé de deux machines à vapeur de trois cylindres à triple expansion qui développaient une puissance de 7200 cv, à une vitesse de 17,5 nœuds sur deux hélices. Il fit sa traversée inaugurale le 22 juillet 1908. Il avait pour mission de rallier les différents ports de l’Afrique française.

Le navire était cloisonné en quatorze compartiments étanches, ce qui ne l’empêcha pas de couler, comme nous le conte cette triste histoire.

Sous le commandement du capitaine Antoine Le Dû, sa ligne de croisière était l’axe Bordeaux—Dakar—Tenerife. Ce navire servit aussi pendant toute la Première Guerre mondiale pour transporter des troupes coloniales et du matériel.

Le nombre exact de passagers, embarqués avant le naufrage, est resté longtemps incertain avec tous les soldats africains, les troisièmes classes, les travailleurs noirs… mais on sait désormais qu’il s’élevait (toutes classes confondues) à 602 passagers dont 28 militaires non africains, 192 tirailleurs indigènes, dix indigènes civils dits des « laptots », 106 personnes de première classe (enfants compris qui étaient au nombre de 19), 67 autres de deuxième classe et 81 de troisième classe dont certains étaient entassés sur l’entrepont avec les « laptots ».

Ces passagers ne sont en aucun cas des touristes ; on y trouve une vingtaine de religieux, beaucoup de militaires, des fonctionnaires de haut rang et leurs subalternes, des commerçants, des représentants de grandes filiales industrielles venues investir en Afrique mais aussi de jeunes épouses, parfois accompagnées de leurs enfants, rejoignant leurs maris.

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Comme l’Afrique était un navire mixte, il transportait aussi de la cargaison. Ce chargement se serait élevé à cinq cents tonnes de « divers », en grande partie des colis postaux, des produits manufacturés, du champagne… Le coffre de bord aurait contenu 20 millions de francs en billets pour différentes compagnies auxiliaires, et la légende voudrait que l’un des membres du clergé présent sur le bateau ait amené de l’or avec lui pour construire une cathédrale à Dakar… Seulement 34 personnes (1 passager et 33 membres d’équipage) reviendront de ce périple.

Le 9 janvier 1920, l’Afrique quitte le quai des Chartrons à Bordeaux pour le Sénégal. Le lendemain, 10 janvier, sortant de l’embouchure de la Gironde, une voie d’eau se déclarait et de l’eau s’engouffrait dans la cale de la chaufferie sans que l’on parvienne à déterminer l’endroit de la fissure. Les pompes furent activées, on n’avait pas idée de l’importance de l’avarie mais le commandant restait confiant. A la tombée de la nuit, le gros temps se leva et la mer se creusa, aggravant les difficultés : les résidus de la chaufferie, balancés par le roulis, se mélangèrent à l’eau qui montait dans les cales et bouchèrent les pompes.

Le vent devenant de plus en plus fort, il fut décidé de faire route vers le port de La Pallice. Le paquebot se trouvait alors à 70 mille nautiques dans le sud-ouest de la Coubre et ce changement de route l’amenait droit vers le plateau de Rochebonne. Dans une mer bien formée et manquant de vitesse, le bateau n’arrivait pas à manœuvrer efficacement et se retrouvait à chaque fois en travers de la lame, rendant son itinéraire très aléatoire, d’autant plus que la tempête se transformait progressivement en véritable ouragan. Le paquebot commençait à prendre de la gîte, progressivement, l’une des deux machines fut alors noyée par l’eau qui montait toujours.

Le Ceylan, venu au secours de l’Afrique, en vain

Dans la journée du 11 janvier, deux remorqueurs basés à Rochefort (le Cèdre et le Victoire) sont envoyés au secours du paquebot en détresse. Mais ce ne sont juste que de petites unités, plus remorqueurs de port que de mer. Un autre navire arriva sur les lieux, le Ceylan, plus grand que l’Afrique et plus performant en vitesse. Il a été construit la même année que l’Afrique par le même chantier, et appartenait à la même compagnie (les Chargeurs réunis).

à 14 h, mauvaise nouvelle: le commandant de l’Afrique apprenait que les deux remorqueurs (Cèdre et Victoire) n’ont pas pu dépasser l’île d’Aix à cause du mauvais temps. Vers 16 h le Ceylan proposait à l’Afrique de le remorquer mais le commandant de l’Afrique lui répondit que opération était impossible et lui demandait juste de l’escorter. L’Afrique essaya péniblement de se remettre en route encore une fois, avec une seule machine encore en état de marche.

Une chaloupe de rescapés accoste au petit jour

A 22 h 00, le bateau heurtait tout à coup le bateau-feu de Rochebonne, par l’avant ; l’embarcation de signalisation frotta la coque du paquebot pendant plusieurs minutes, sur une grande parti de son bordé tribord, le découpant comme un ouvre-boite et noyant plusieurs compartiments étanches qui jusque là, avaient tenu le coup. Devant la situation désespérée, les embarcations de sauvetage furent lancées à l’eau sur bâbord, mais à peine les passagers prêts à descendre vers les canots que ceux-ci furent projetés dans la mer avec les hommes d’équipage. On passa alors aux embarcations de tribord, mais à peine descendues, celles-ci furent emportées par la fureur des flots. La plupart des 602 passagers, malades et apeurés, n’ont pas voulu grimper à bord des canots de sauvetage. Les hommes de l’équipage ont tout fait pour forcer les passagers à embarquer et ne sont montés dans les canots qu’à la dernière minute. Le commandant Le Dû est resté à son poste jusqu’à la fin et n’a jamais quitté son navire, contrairement aux hypothèses émises à son sujet. Sa dernière action fut de faire monter les passagers sur le pont de l’équipage (le point culminant du navire) et d’avoir attendu sereinement la mer qui engloutissait son navire…

Trois mois après le sinistre, personne ne parlait plus de l’Afrique, à part les habitants de la côte vendéenne. Ce fut pourtant la plus grande catastrophe maritime française, il n’existe aucune commémoration de cet événement, survenu deux ans après la fin de la Première Guerre mondiale. De plus, comme on se trouvait en période électorale, les journaux avaient d’autres sujets à publier… Il existe une plaque commémorative aux Sables-d’Olonne près du mémorial aux disparus en mer, près du fort Saint-Nicolas.

A 25 milles des Sables d’Olonne, aux coordonnées : latitude 46° 16’ 541 N et longitude 02° 14’ 997 W, par 44 à 48m de fond, l’Afrique gît sur un lit de sable. Cette épave nécessite plusieurs plongées pour la voir correctement en entier. La visibilité avoisine souvent 30 m. L’étrave est très bien conservée (avec l’ancre sur le sable) et légèrement inclinée sur tribord. Vers le milieu du navire, les flancs bâbords sont encore debout. On y découvre les six chaudières entourées d’un amas de poutrelles, de tôles, de ferrailles et de tuyaux en tout sens. Epave à découvrir en la surplombant par 35/40 m pour avoir une vue d’ensemble, par bonne visibilité.

Vidéo de la plongée sur l’épave de l’Afrique :

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