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Par Paul Poivert

Le parachute de palier est passé dans l’usage courant de tous les plongeurs. Il y a encore quelques années, il était réservé au chef de palanquée. Aujourd’hui, il est susceptible d’être utilisé par les plongeurs de tous niveaux. Mais si le parachute est un accessoire très utile à la stabilité du plongeur aux paliers, son utilisation n’est pas sans risque. Un apprentissage particulier à sa pratique est nécessaire afin d’éviter certains désagréments qui peuvent rapidement provoquer de grosses difficultés…

L’actualité récente a montré que même un plongeur expérimenté peut se laisser piéger lors d’un moment d’inattention. Plusieurs types de problèmes peuvent survenir, de l’emmêlement du fil à la remontée rapide, et chaque situation nécessite une intervention appropriée.

Le sac de nœuds

 

Au déroulage, attention au sac de nœuds ! (photo Paul Poivert)

Le plongeur, en cours de remontée, sort fièrement son parachute flambant neuf de la poche de son gilet stabilisateur, commence à dérouler le fil. Celui-ci flotte autour de son propriétaire, formant de gracieuses circonvolutions qui finissent par s’accrocher au détendeur, à la robinetterie, bref, à tout ce qui dépasse… En quelques secondes, et malgré les efforts de l’infortuné, voilà notre plongeur saucissonné dans son fil comme une splendide rosette lyonnaise, le parachute pendant lamentablement à ses côtés comme un vulgaire préservatif usagé…

Jusque là, la situation n’est pas encore catastrophique. Le maître mot : ne pas paniquer !!! Le plongeur, pour éviter de s’emmêler, doit arrêter tout mouvement et faire signe à son coéquipier de venir l’aider à se dépêtrer de sa situation délicate.

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Le “sac de nœuds” peut entraîner une remontée intempestive et le plongeur peut se retrouver en surface sans s’en rendre compte (photo Paul Poivert)

Le point à surveiller impérativement : son ordinateur ! Comme la scène se passe lors de la remontée, le plongeur ne doit pas perdre la maîtrise de cette remontée. Les risques : se laisser embarquer vers la surface et ne plus maîtriser la vitesse d’ascension, avec au final une splendide apparition en surface, tel le dauphin bondissant, juste avant les premiers symptômes de l’accident de décompression…

Ou alors, scénario inverse, le plongeur descend sans s’en rendre compte et peut se retrouver, toujours entortillé, à une profondeur non désirée, voire problématique…

Donc, première mesure, conserver sa bonne stabilisation pour éviter tout incident. Ensuite, et seulement quand la stabilisation est maitrisée, on peut se débarrasser du fil.

Pour éviter ce problème, une solution toute simple : fixer un plomb à l’extrémité inférieure du fil. Ainsi, quand on déroule celui-ci, il descend bien verticalement. On saisit alors le parachute pour le gonfler. Au moment de le lâcher, le plongeur doit prendre la précaution d’écarter les jambes, afin d’éviter un accrochage intempestif du fil ou du plomb au passage.

La descente incontrôlée

Lors du déroulage du parachute, il faut bien surveiller sa stabilisation (photo Yvan Chocoloff)

Tout absorbé au déroulement de son parachute, le plongeur ne surveille pas (et ne maîtrise pas) sa stabilisation. Il peut ainsi redescendre sans s’en rendre compte. Une telle situation lors du gonflage peut être rattrapée sans trop de problèmes, si le plongeur se rends compte rapidement de la situation. Pour cela il est nécessaire de rester vigilant à sa position dans l’espace.

Une variante plus sournoise peut se produire pendant le déroulement des paliers. Le parachute est gonflé, il s’est envolé normalement vers la surface, le fil pend bien verticalement et toute la palanquée vient s’accrocher afin de trouver un point d’appui et se reposer. Mais voilà, le parachute, cette espèce de saucisse orange vendue chez tout bon revendeur, est simplement un moyen de signalisation en surface et n’est pas prévu pour soutenir autant de poids (ça, beaucoup de revendeurs oublient de le préciser !). Résultat : tout ce petit monde, suspendu à ce parachute bien gonflé, ne se rend pas compte que ledit parachute est en train de couler, sa flottabilité n’étant pas suffisante pour supporter le poids de plusieurs plongeurs.

 

Les parachutes “saucisses” de petit volume, n’offrent pas de point d’appui. Attention à ne pas redescendre ! (photo Yvan Chocoloff)

S’ils se trouvent en pleine eau, les membres de la palanquée risquent de redescendre à une profondeur plus ou moins importante avant de s’apercevoir du problème. Les risques sont, outre un éventuel barotraumatisme, la modification des paramètres de plongée, une surconsommation (dangereuse en fin de plongée, la réserve de gaz pouvant être insuffisante), voire même l’apparition d’une narcose, panique, etc.. Le genre de situation qui a l’air bénin, mais qui peut rapidement dégénérer et tourner au drame. Il y a quelques années, trois membres d’une même palanquée ont disparu de cette façon : les plongeurs, trop lourds, avaient lâché le parachute à une profondeur importante, comptant effectuer la remontée en s’aidant du fil. Malheureusement, ce n’est pas eux qui remontaient, mais le parachute qui descendait, les entraînant vers les profondeurs. La narcose s’installa et l’issue malheureuse devint inéluctable. Sur une palanquée de cinq membres, seuls deux plongeurs purent regagner la surface.

En toutes circonstances, même aux paliers, le plongeur doit rester maître de ses conditions de plongée. Le fait de se trouver aux paliers ne doit pas diminuer la vigilance : on continue à observer l’environnement, à contrôler son ordinateur de plongée pour vérifier que tout se passe normalement.

L’accrochage intempestif

Toujours dérouler le fil du parachute, dos au courant pour éviter qu’il s’accroche à l’équipement (Photo Paul Poivert)

Le plongeur a bien déroulé son parachute, l’a gonflé, puis l’a lâché pour le regarder filer vers la surface, quand brusquement, il sent une poussée brutale du bas vers le haut, qui n’a rien à voir avec celle d’Archimède (enfin, pas directement…) : une boucle du fil s’est accrochée au passage, ou bien le mousqueton au bas du fil… Résultat, se trouvant à quelques mètres de la surface, embarqué rapidement vers celle-ci, le plongeur, se débattant avec le fil accroché va se retrouver à l’air libre sans vraiment l’avoir souhaité (surtout s’il a des paliers…). N’ayant ni le temps, ni les moyens de résoudre à la fois son problème de fil accroché et de purger simultanément son gilet, l’air contenu dans celui-ci prend du volume (sacré Mariotte !) et entraîne l’infortuné de plus en plus rapidement vers la surface.

Perte de stabilité pendant la préparation du parachute (photo Yvan Chocoloff)

Dans le meilleur des cas (pas ou peu de paliers), le plongeur n’aura plus qu’à se décrocher et regagner au plus vite son palier de sécurité, avant de recommencer sa remontée dans de bonnes conditions. Il doit pour cela faire vite car dans le cas de paliers importants, la remontée brutale risque de provoquer un dégazage brutal et se solder par un grave accident de décompression. La remontée incontrôlée provoque un dégazage au niveau des tissus rapides (sang, tissus nerveux, cerveau) qui peut conduire à l’accident neurologique très grave (au contraire de la non-tenue d’un palier, qui touche plutôt les tissus moyens et longs.

Cette situation est bien sûr la plus grave, mais elle peut arriver aussi bien au débutant qui ne surveille pas son fil, qu’au plongeur chevronné lors d’un moment d’inattention.

Le bon gonflage

Lors du gonflage du parachute, bien écarter les jambes pour que le fil ne s’accroche pas, risquant alors d’entraîner le plongeur avec lui (photo Paul Poivert)

A tout problème, sa solution. Comment gonfler son parachute en minimisant les risques ? Tout d’abord, comme indiqué plus haut, un petit plomb au bas du fil permet de le tendre lors du déroulement. Pendant le gonflage, il est nécessaire de garder un œil sur le fil pour vérifier qu’il ne s’accroche pas. Le plongeur se place dos au courant, de façon que le fil s’écarte naturellement de lui. Puis il écarte les jambes pendant la montée du parachute afin d’éviter tout accrochage.

Gonfler le parachute à la profondeur des paliers présente un risque de remontée intempestive, d’autant plus incontrôlable que le plongeur se trouve près de la surface. Prévoyez donc un fil plus long de façon à pouvoir l’envoyer plus profondément. Au cours de la remontée, le plongeur a alors tout loisir de préparer son parachute, puis injecte seulement un peu d’air (environ un quart) avant de le lâcher. Peu gonflé, le parachute monte lentement au début, ce qui permet de bien le contrôler. En cas d’accrochage, on peut encore le retenir, le temps de remédier au problème. En s’approchant de la surface, l’air contenu dans le parachute prend du volume, de façon que celui-ci se trouve pleinement gonflé à son arrivée en surface.

L’utilisation d’un moulinet permet de lancer le parachute depuis une profondeur plus importante, là où le plongeur sera plus stable. Il sera aussi repéré plus vite en surface en cas de courant (photo Yvan Chocoloff)

Mais me direz-vous, l’utilisation d’un fil de grande longueur peut aussi être un facteur augmentant les risques d’emmêlement. C’est vrai. La solution se trouve dans l’utilisation d’un moulinet. Avec cet accessoire, on peut dérouler le parachute depuis le fond, avant même d’entamer la remontée. On n’injecte que très peu d’air dans le parachute, puis on déroule le fil au moyen du moulinet. Quand le parachute est en surface, pleinement gonflé (grâce à Mariotte, encore lui !), le plongeur effectue sa remontée en se référant au fil et en le rembobinant. Il est tout de même nécessaire de bien maîtriser l’utilisation du moulinet. Des formations à la pratique de cet accessoire sont organisées par les moniteurs Tek.

Le bon parachute

Un parachute de grand volume peut offrir un point d’appui appréciable, lors des paliers comme en surface (photo Paul Poivert)

Le choix du parachute est aussi un élément important. La plupart de ceux que l’on trouve dans le commerce ne sont que des saucisses de signalisation et n’offrent pas de point d’appui suffisant. Il est préférable de ne pas se suspendre au fil pendant les paliers sous peine de s’enfoncer. Un parachute de volume plus important permet de soutenir un plongeur lourdement équipé, voire une palanquée complète. Il ne faut donc pas hésiter de prendre un parachute de gros volume, capable de soutenir le plongeur en cas de besoin, qui sort suffisamment de l’eau pour être vu de loin. Un parachute avec un système l’empêchant de se vider et muni d’une valve de surpression permet de s’assurer qu’il ne se videra pas en remontant ou bien s’il se retourne en surface. De plus, si le plongeur doit attendre le bateau, il offrira un excellent point d’appui en surface.

La remontée gérée par l’enroulement du moulinet offre beaucoup d’avantages (photo Paul Poivert)

Avec l’utilisation d’un moulinet, le plongeur lâche le parachute faiblement gonflé depuis le fond. Arrivé en surface, le parachute, bien gonflé et sans risque de se dégonfler, devient un support très utile. Le plongeur va effectuer sa remontée en enroulant le fil sur le moulinet, et ce fil représente un point d’appui sûr au cas où le plongeur aurait besoin de se maintenir. La remontée peut ainsi s’effectuer au centimètre près, et les paliers se feront sans effort et avec une bonne stabilité.

D’accessoire facultatif, le parachute de palier est devenu aujourd’hui un élément important de l’équipement du plongeur, obligatoire pour le chef de palanquée. Mais son utilité est encore sous-estimée et on l’utilise encore plus comme accessoire de signalisation que comme élément de sécurité. Des progrès restent encore à venir donc dans l’utilisation de ce matériel qui est pourtant un outil essentiel pour la sécurité du plongeur.

Un second article sera publié très bientôt sur le choix du meilleur parachute de paliers. Ne le manquez pas !

 

1 COMMENT

  1. Très bien, pour ma part j’explique l’envoi du parachute ainsi :
    1/ ne pas se mettre vertical car cela ressemblerait à une fusée 🚀avec son booster, mais à l’horizontale et ainsi meilleure stabilité et les palmes sont à l’opposé du fil. Dans cette position surveiller son ordinateur ou son binôme.
    2/ Le regard dirige la tête et la tête oriente le corps (comme dans les sports de glisse) il n’est pas utile de regarder si le plomb descend, mais s’être bien assuré au préalable qu’il ne bloquera pas au fond, puis s’assurer que la surface est libre avant de l’envoyer.
    3/ Gonfler le parachute avec son octopus, toujours garder son détendeur principal en bouche, penser à expirer pendant le gonflage. Ne pas bloquer la ficelle et surveiller sa profondeur.
    4/ Dans le cas où on donne de l’air à un autre plongeur, celui-ci tient ma stab, et je gonfle mon parachute en soufflant dedans par la moustache opposée au tuyau.
    5/ Pendant la remontée la ficelle est repliée, mais en restant toujours prêt à lâcher si le parachute est attrapé par une embarcation.
    6/ En surface, en fin de plongée, le parachute reste gonflé et vertical pour une meilleure visibilité, et il est donné au bateau avec sa ficelle rangée (pour ne pas bloquer la ou les hélices) et gonflé pour lui éviter de couler en cas de perte. La quasi totalité de mes parachutes a été trouvée au fond 😉

    En conclusion, toujours s’entraîner régulièrement à l’envoi du parachute de palier, particulièrement en fosse (avec accord du DP, et en évitant les plombs trop lourds), et également avec des gants épais.

    Bonnes plongées en totale sécurité.

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